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Bonjour,
Je suis formée niveau 1 en mars 2020 et en attente désespérément de pouvoir faire la suite de la formation…
Nous avons enfin reçu les monofilaments dans la structure où je travaille. Malheureusement nous n'avons toujours pas le pied à coulisse pour l'évaluation des deux points
Voici ma première évaluation qui me pose déjà question ! Etant novice, n'hésitez pas à me reprendre sur ma méthodologie de l'évaluation, sur les termes utilisés etc... Je suis désireuse d'avoir une pratique la plus précise possible !
Le patient intègre notre hôpital de jour pour SDRC de cheville gauche. Il a eu un écrasement de la cheville il y a 4 ans. Le patient me dit qu’il n’a pas eu de fractures mais qu’il a tout de même été plâtré pendant 2 mois (je vais essayer d’obtenir son dossier médical pour m’assurer qu’il n’y ai pas eu de lésions).
Il a eu d’abord des douleurs localisées qu’au pied. Puis du jour au lendemain des douleurs dans toute la jambe. A l’entretien il décrit une sensation de compression et de chaleur toujours présente. Il évoque une diminution de la sensibilité le long du tibia et sur la face dorsale et latérale du pied et probablement une diminution de la sensibilité profonde (ne parvient pas à savoir la position de son pied dans l’espace). Il ne décrit pas de douleurs provoquées au tact, pas d’inconfort au toucher de la zone.
Au vu de l’indication de la prise en charge et de l’échange avec le patient je pars donc sur l’hypothèse d’un SDRC de cheville avec présence de paresthésies dans les zones du nerf fibulaire et peut être aussi du nerf tibial.
1ère évaluation : procédure diagnostique du CRPS de Budapest. Les éléments valident bien la présence d’un SDRC.
2ème évaluation : QDSA : Score sensoriel : 39, Score affectif : 39. On retrouve notamment les signes suivants : engourdissement, fourmillement et décharges électriques
3ème évaluation : J’ai quand même un doute sur la présence d’une allodynie. Alors je sors mon monofilement de 15g et pars pour une allodynographie du territoire du nerf cutané sural latéral (zone décrite comme étant la plus gênante par le patient). Et là je ne retrouve pas d’allodynie. Le patient sent mais cela n’est pas désagréable/douloureux.
Je m’oriente donc sur une esthésiographie de cette branche. Je retrouve donc bien une hypoesthèsie. Diagnostic posé à ce moment là : SDRC de cheville avec hypoesthésie de la branche du Nerf cutané sural latéral (Stade V de lésion axonale Ab)
(Malheureusement je n’ai pas encore l’outil pour l’évaluation des deux points :’( ).
Le SPP est de 8g, on est donc légèrement au-dessus du seuil qui permet de distinguer une légère ou une forte hypoesthésie. Je suis surprise de ce résultat car j’ai relu que dans le cadre d’un SDRC l’hypoesthésie est toujours légère…
Etant donné qu’on est tout de même proche du seuil et qu’il semble difficile de mettre en place la thérapie des tracés, je lui présente la thérapie du touche à tout et lui explique que cela doit être réalisé avec différentes textures qui doivent être agréables. Et là il me répond « Ah oui, pas un jean alors car je ne supporte pas le contact c’est pour ça que je suis toujours en short ».
Et me voilà d’autant plus perdue… Au début de l’entretien il me décrit ne pas avoir d’inconfort au toucher, l’allodynographie est négative et malgré ces éléments il m’annonce en fin de séance ne pas supporter le contact de son jean…
Est-ce qu’on serait donc en présence d’un SDRC (stade V de lésion axonale Ab) avec une allodynie qui s’est résorbée d’elle-même et donc actuellement en phase d’hypoesthésie sous-jacente ?
Merci d'avance pour vos lumières. J'ai hâte d'en comprendre un peu plus !
Diane
Réponses
Bonjour Diane,
Pour réaliser une allodynographie il est important d'avoir pris le temps de faire une EVA complète et précise, c'est cette EVA qui te permettra de trouver le "STOP" pour ton allodynographie.
Comment s'est passé la passation de l'EVA ?
J'ai parfois des patients qui ont tendance à dire que les "sensations sont encore supportables" or pour l'allodynographie on ne demande pas leur seuil de "supportabilité de la douleur" mais bien l'augmentation de celle - ci en fonction de l'EVA.
Tu pourrais peut être reprendre avec lui cette évaluation ? Essayer de retester le territoire ?
Quelles consignes lui as-tu donner sur la thérapie du touche-à-tout après qu'il t'ait dit qu'il ne supportait pas le jean ?
En espérant avoir pu t'éclairer un peu ?
Mathilde
RSDC
Bonjour Diane,
Tant de questionnements en début de prise en charge, cela me rappelle mes débuts (et parfois même maintenant je me sens bien perdue face à certaines situations ^^')
J'aime bien porter l'attention de mes patient(e)s sur l'importance des mots : que veut-il vraiment dire par "ne pas supporter" ? Est-ce désagréable ? Bizarre ? Ou encore douloureux ?
Et dans quelle temporalité : tout de suite ? Au bout d'un moment ?
Je pense que lors de ta prochaine séance, tu auras qqes réponses en lien avec la thérapie du touche à tout que tu lui as prescrite
De mon point de vue, si tu as pu tester toute la zone décrite comme étant la plus désagréable avec le 15g sans avoir de réponse positive, tu n'es pas face à une allodynie...
Ton commentaire comporte de nombreux sujets de discussion… Les commentaires de Mathilde et de S. Jacot-Descombes (désolée, je ne connais pas le prénom), sont très pertinents.
Tu devrais effectivement savoir à la prochaine rencontre si ton patient présente de l’allodynie, SI le touche-à-tout se situait dans un territoire à éviter par rapport au territoire de provenance cutanée de la branche lésée présentant l’allodynie, qui n’est pas nécessairement le nerf cutané sural latéral… Voir page 211 du manuel de 4e édition. Si c’est le cas, le traitement de touche-à-tout proposé devrait avoir fait amplifier sa douleur.
Quand tu écris que ton patient ne sent pas bien son pied dans l’espace, c’est « un symptôme de plus » du SDRC, démontré entre autres par les « images de Christian Maihöfner qui montrent la réduction de la représentation du cortex somatosensible primaire chez un patient souffrant d’un SDRC. » (p. 303 du manuel 4e édition).
Avant d’évaluer, il est vrai que l’on doive prendre du temps pour bien se comprendre dans tous nos termes avec le patient. Bizarre, inconfortable, intolérable, douloureux… pas facile de placer la ligne d’où débute l’allodynie. Le QDSA nous permet déjà de faire ressortir les qualificatifs associés à l’hypoesthésie versus ceux associés à l’allodynie. Les qualificatifs que tu rapportes ressemblent effectivement davantage à de l’hypoesthésie et il y en a suffisamment (au moins 3), pour parler de névralgie. Tu sembles rapporter qu’ils n’étaient pas provoqués par le toucher, mais ceux qui sont permanents (incessants) sont la « compression » et la « chaleur »… quel type de chaleur et localisée où? Y a-t-il des nuits sans repos? Combien de réveils par nuit? Les autres symptômes sont-ils spontanés intermittents ou également incessants? Si les symptômes névralgiques sont incessants, le patient a de surcroît mal au toucher. (p. 261 du manuel 4e édition).
Mais si l’on doute de présence d’allodynie, c’est vrai qu’il est important d’utiliser l’E.V.A. avant de procéder à l’allodynographie. Nous devons insister «lourdement sur la nécessité que le stimulus tactile soit perçu de façon ‘confortable’, … » (p. 219 du manuel de 4e édition, dans l’encadré noir).
D’autre part, il se peut que le jeans crée une sensation un peu inconfortable sans être douloureuse si ce n’est pas à un endroit de douleurs incessantes, ou qui est quand même douloureuse à cause du caractère incessant des douleurs de cet endroit. Selon ce que j’ai observé, quand il y a engourdissements, parfois au toucher la sensation est amplifiée mais de type « bizarre », « lointaine », comme après une anesthésie qui « dégèle » lors d’une réparation de dent… et quand on a le choix d’avoir ou non un vêtement qui amplifie cette sensation, parfois on choisit d’éviter le vêtement. Mais cela reste à valider avec ton patient. D’autant plus qu’il prend la peine de dire qu’il évite ce type de toucher, on peut aussi prétendre à de l’allodynie. Vérifie aussi l’endroit où il ne tolère pas son jeans. Peut-être que c’est une autre branche nerveuse que tu n’as pas testée? Mais si c’est la même branche, soit qu’il a dépassé le « Stop » de l’E.V.A. et que l’allodynographie est biaisée, soit qu’il a dit « stop » au bon moment et que ton Allodynographie est vraiment négative, donc l’inconfort viendrait de l’engourdissement ou autres qualificatifs bizarres relatifs à l’hypoesthésie.
Si tu peux trouver un.e thérapeute formé.e de niveau 3, ou minimalement de niveau 2, ce pourrait être utile qu’iel te guide ou idéalement, qu’iel puisse être co-thérapeute. Il peut parfois y avoir prêt de service d’un établissement à un autre. On ne perd rien à demander! L’évaluation et le traitement du SDRC sont enseignés seulement à partir du niveau 2. Ça risque d’être difficile pour toi de travailler seule avec ce patient qui présente une condition aussi complexe tant que tu n’auras pas suivi la formation avancée. Par exemple, te sens-tu assez convaincue pour recommander à ton patient de ne pas marcher sur son pied gauche tant que le SDRC ne sera pas éteint? (p. 295 du manuel 4e édition)
Aussi, il faudrait revoir un peu comment nommer ta condition neuropathique (et non ton « diagnostic »). Et ici, c’est au niveau 2 qu’on l’apprend davantage. Tu es tout près, mais est-ce qu’on doit nommer l’articulation dans la condition? Et est-ce que le mot « branche » du nerf cutané sural latéral (p. 78 de l’atlas) devrait ou non faire partie de la définition de ta condition? Quelqu’un.e veut l’aider? Tu peux voir un exemple de comment écrire une condition relative à un SDRC à la page 290 du manuel de 4e édition, qui réfère à la page 35 de l’Atlas…
Bon succès malgré tout et reviens-nous avec la suite!
Guyane Mireault, RSDC niveau 3
As-tu revu ton patient?
Le Touche-à-tout était-il confortable finalement?
Mon dernier commentaire était long et dur à suivre. Désolée.
Ne te décourage pas à continuer de faire appel au forum. Tes questions sont bonnes et nous aimerions continuer de t’aider.
Au plaisir de lire la suite!
Guyane
Désolée du temps de réponse, je n'ai pas eu beaucoup de temps pour poser toute ma réflexion à l'écrit
Tout d’abord merci beaucoup pour vos retours ! Cela me pousse à me questionner et donc à progresser. Bien que je sois consciente qu’avec mon niveau 1 je me retrouve grandement limitée ! Je n’ai malheureusement pas de thérapeute RSDC vers chez moi qui pourrait m’aider.
J’ai de nouveau questionné mon patient sur ses douleurs il me dit que la plus présente est celle d’étau. La douleur augmente au cours de la journée pour devenir insupportable le soir. Il a du mal à l’endormissement et a souvent des réveils nocturnes. Il me dit avoir une sensation de chaleur dans toute la jambe mais pas de brulure. Alors là je me questionne : Est-ce qu’on est donc bien sur un SDRC ou bien tout simplement sur une Nevralgie incessante ou bien même une névralgie intermittente mais avec plusieurs branches touchées ? Me voilà encore plus perdue… .
Comme j’avais notion que le SDRC était uniquement dans une articulation cela me semblait bizarre de parler d’un SDRC en lien avec une branche sensitive. Je renomme donc la condition neuropathique de cette façon : SDRC de la branche du Nerf cutané sural latéral (Stade V de lésion axonale Ab). Mais dans ce cas doit on préciser « Avec hypoesthésie » ?
Concernant l’EVA, au moment de l’évaluation il place sa douleur à 7/10... Je sais que l’allodynographie va donc être difficile à réaliser étant donné que la douleur de base est déjà élevée. Néanmoins, j’ai retenté de réaliser une allodynographie toujours sur la zone la plus douloureuse et qui correspond aussi à la zone où il ne supporte pas son jean. Le patient dit qu’il sent le monofilement, de façon très estompée mais que cela ne déclenche vraiment aucune douleur, il ne m’a jamais dit STOP, uniquement « je sens que par moment ».
J’ai depuis refait un SPP qui a été à 15g, moins bon donc que le premier. J’ai trouvé les disques pour les 2 points mais malheureusement le plus grand espacement est de 15mm et le patient ne parvient même pas à distinguer les deux moins de cet écartement. Je pense donc qu’on est sur une hypoesthésie sévère
Après notre première évaluation je lui avais demandé de réaliser la thérapie du touche à tout. Il a pu le mettre en place à son domicile et me dit qu’il sent vraiment très peu mais que cela n’augmente pas du tout ses sensations désagréables. Cela me rassure sur le fait qu’on est en effet en absence d’une allodynie.
CONCLUSION : Au vu des éléments décrits par le patient et des nouvelles évaluations réalisées. Je pense pouvoir établir le fait qu’on est sur une hypoesthèsie sévère. J’oriente donc le patient vers la rééducation des tracés. Nous avons testé ensemble et en effet, il a déjà du mal à distinguer un point fixe d’un trait. Je pense qu’on va continuer à travailler ça et à évaluer toutes les 2 semaines le SPP et tous les mois réaliser une nouvelle esthésiographie.
Hésitez pas à me corriger de nouveau si ma démarche, ma réflexion ou mon vocabulaire n'est pas le bon
Merci pour ce retour!
Ta démarche démontre une bonne réflexion en général.
Quelques précisions pour t’aider:
-Pour savoir si ton patient a un SDRC, il doit répondre aux critères du tableau diagnostic du SDRC de Budapest. Peut-être qu’un.e RSDC pourrait t’accompagner à distance, comme binôme, dans cette évaluation? Appel à tous/toutes sur le forum!
-On ne refait jamais l’esthésiographie. Elle est faite au début, puis les suivis alternent entre le test des 2 points statiques et le SPP. Je te conseille de te procurer l’outil de discrimination des deux points qui va jusqu’à 100 mm (10 cm). Baseline en fait un entre autres.
Je laisse d’autres membres répondre à tes autres interrogations.
Bonne continuité et bon courage à ton patient!
Guyane