Bonjour à toutes et tous,
Ces dernières semaines, j’ai fait face à des questionnements concernant une patiente que je suis depuis 2018 et avec qui je n’arrive pas à apporter de soulagement, ni à fermer le dossier vu qu’elle me rapporte toujours un nouveau problème. Spina bifida, lipome lombaire, syndrome de queue de cheval, fibromyalgie, douleurs au toucher, spontanées, brûlures dans la cheville depuis un accident en véhicule tout-terrain en 2010, déplacées quelques années plus tard dans le mollet, pertes de mémoire, brouillard mental, étourdissement, problèmes de vision, douleur dans l’oreille ou la figure depuis traitement dentaire, douleurs aux coudes, à l’aine, dans le dos, l’épaule, coussins non confortable, insomnie… oui, j’écoute et je cherche avec elle des tests, investigations, tente de la RSD qui fonctionne puis soudainement provoque un brasier de douleurs après un test…
J’ai présenté le profil de ma patiente à une collègue neuropsychologue qui m’a aiguillée vers la possibilité d’un trouble neurologique fonctionnel (TNF). Je ne connaissais pas ça. Pourtant, les écrits indiquent que 30% des consultations en neurologie ressortent avec ce diagnostic !!! Il inclurait la fibromyalgie, le SDRC et plein d’autres troubles fonctionnels qui ne trouvent aucune réponse dans les examens médicaux.
Les lectures débutées me font comprendre qu’en présence du TNF, le cerveau est comparé à un ordinateur qui n’a pas de problème, mais dont un ou des logiciels font défaut. J’y vois beaucoup de liens avec le phénomène de sensibilisation centrale, sans savoir si le fonctionnement du TNF y est relié… mais le soutien en santé mentale est important.
Vos expériences, commentaires?
Guyane Mireault
Réponses
J'orienterais donc cette patiente vers un thérapeute qui pratique le décodage biologique, ou équivalent...
Coeurdialement
Isabelle M
Bonjour Guyanne,
Le TNF est en effet très mystérieux! J’ai été surprise moi aussi de voir le pourcentage de cas où cette problématique serait en fait le bon diagnostic.
Je ne sais pas si c’est la place ici, mais je te réfère à l’émission découverte du 27 octobre 2024, où la condition est très bien vulgarisée. Cela te mènera par le fait même à en connaitre davantage sur la clinique spécialisée à HMR.
Quand le cerveau induit le corps en erreur | Découverte : https://ici.radio-canada.ca/tele/decouverte/site/segments/reportage/1890247/cerveau-trouble-neurologique-fonctionnel-chum
Il y a aussi cet excellent balado, fait par un physiothérapeute, Alexis Gougeon, où il a fait une entrevue avec l’ergo et le physio de cette même clinique spécialisée. https://baladoquebec.ca/parle-moi-de-sante/59-le-trouble-neurologique-fonctionnel-avec-pierre-luc-levesque-et-delphine-belanger
Je constate que parfois, pour certaines personnes ayant un dx de SDRC, traitées depuis plusieurs années sans amélioration, le changement d’approche vers celle du traitement d’un TNF apporte des bénéfices inestimables. Par contre, pour que cela soit efficace, il faut l’adhérence du patient, comme avec toute autre intervention d’ailleurs.
Attention, lisez-moi bien, je ne dis pas ici que tous les patients ayant un SDRC doivent être traités avec cette approche, il faut bien évaluer, bien écouter notre patient, bien comprendre la condition et cela demeure très délicat.
bonjour toutes et tous,
Merci Marie-Elaine Lafrance pour les références.
Mes collègues ergothérapeutes du système public me parlent aussi du TNF même chez l'enfant. Il m'apparait aussi un diagnostic de plus en plus donné pour des maux qui ne trouvent pas de réponse dans les examens neurologiques.
Mais quel que soit le diagnostic, c’est certain qu'il y a un lien entre la santé mentale et les maux physiques. D'où l'importance d'être à l'écoute de nos client.e.s et de leur permettre de s'exprimer, comme nous l’avons appris dans nos modules avancés RS. D'où l'importance du QDSA pour donner une porte d'entrée pour parler de la souffrance émotionnelle et de reconnaître celle-ci, d’en faire le lien avec la souffrance sensorielle. D'où l'importance de la respiration dans nos modalités thérapeutiques comme nous l'avons vu en cours RS. Dans la complexité de ta cliente, tu fais bien de travailler en interdisciplinarité. N'hésite pas de référer en psychologie si tu juges le besoin.
Lors du Congrès de la Société Québécoise de la douleur, divers moyens de gestion de la douleur ont été abordés, comme l'alimentation, l'activité significative (nous avons vu le chef d’oeuvre d'une jeune cliente RS dans le somatosens pain rehab 2021 (18)4 et nous lisons la plume d'Estelle Murray) et suivre ses valeurs par l’Act thérapie. Tout cela peut être fait en parallèle de la RS et est très ergo.
https://www.neuropain.ch/sites/default/files/e-news/somatosens_pain_rehab_2021_18_4.pdf
Bon mois de décembre à toutes et tous,
Véronik Gibeau
Ergotherapeute
RSDC
CSOT (certified sexuality OT)
Autrice
Attention * à relire attentivement * Attention
Chère Guyane, MERCI, d'avoir abordé ce thème qui requiert beaucoup de NUANCES.
Chères Isabelle, Marie-Elaine, Véronik,
Chères toutes & chers tous,
Ce terme de Trouble Neurologique Fonctionnel (TNF) est très dangereux pur la méthode de RSD, car son traitement est incompatible avec le nôtre. Tout comme il est impossible, de suivre, en même temps, un·e patient·e qui bénéficie de blocs nerveux.
Au XIXe siècle, Guillaume Dupuytren chirurgien-major à l’Hôtel-Dieu de Paris,a créé le modèle anatomo-pathologique : (1) chercher la cause de la maladie, (2) traiter cette cause et (3) ses conséquences, les symptômes, seront guéris. Cela est parfaitement juste.
A la fin du XXe siècle, la médecine est, petit à petit, arrivée au grand effacement du symptôme: lorsque les résultats reviennent négatifs, certain·es clinicien·nes procèdent alors à l’effacement des symptômes : « Ne vous inquiétez pas, tout est normal », « Circulez, il n’y a rien à voir», alors que nous avons reçu un cœur pour sentir, des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. En effet la mise en échec de la recherche de l’étiologie originelle n’autorise pas l’effacement du symptôme : , alors que les symptômes douloureux qui ont motivé la première consultation sont toujours là, présents par intermittence, voire en permanence. /Spicher, Murray, Chapdelaine, à paraître).
La méthode de RSD trouve elle une étiologie avec 1). une plainte, 2). des symptômes, 3) des signes objectifs d'examen clinique.
Le diagnostic de TNF part d'une intention louable: Cessez de chercher l'étiologie - vous ne la trouverez pas - et traiter les symptômes. C'est le discours juste des soins palliatifs: En présence d'une symptôme si l'étiologie disparaît le symptôme reste.
Toutefois, l'étiologie du TNF est décrite comme psycho-somatique. Les traitements spécifiques ressemblent beaucoup - avec un autre discours - à l'ergothérapie fonctionnelle de la fin du XXe siècle; bien qu'elle soit prodiguée par des spécialistes.
Personnellement, j'ai n'ai pas observé les résultats de ces traitement pour les douleurs neuropathiques et les SDRC de Budapest décrits dans la littérature. Les rares fois, où j'ai référé des patient·es dans ces cliniques - ou services -, je n'ai pas pu lire ou entendre des retours significatifs.
Et vous ?
Claude Spicher
Merci pour chacun de vos commentaires. Ils me parlent tous, même s’il y a des fondements qui pourraient parfois être opposés ou non compatibles.
J’y vois quand même un point commun: « remonter le fleuve des souvenirs… »
Isabelle, est-ce que le « décodage biologique » est un nouveau terme pour ce qu’on appelait la « biologie totale »?
Marie-Élaine, merci pour tes liens. Et tu dis avoir constaté des bénéfices inestimables avec l’approche TNF chez des personnes traitées pour SDRC sans changements depuis plusieurs années. Ceci répond un peu à la question de Claude.
Oui, Véronik, nous avons bien vu au congrès de la SQD, l’importance de détourner nos pensées des symptômes pour sortir du cercle vicieux des douleurs. L’activité significative et le retour à nos valeurs démontrent des résultats dans les données probantes. La thérapie cognitive -comportementale fait ses preuves face au TNF et ceci rejoint ce qu’on a entendu dans d’autres mots au congrès, même s’il n’a pas été question du TNF.
Claude, je comprends que si les médecins jettent l’éponge quand il n’y a pas de tests médicaux positifs et qu’ils concluent au TNF en disant « c’est dans votre tête », tout notre travail en RSD est balayé du revers de la main. Ils n’ont pas lu l’article « Neurographie négative mais douleurs neuropathiques probables » (Voir pages 20 à 33: https://www.neuropain.ch/sites/default/files/douleursneuropathiques/douleurs_neuropathiques_2018.pdf)
D’autre part, ma collègue neuropsychologue me disait, comme le soulève Marie-Élaine, que lorsque le diagnostic de TNF est expliqué en toute délicatesse et que le médecin reconnaît la présence des symptômes, il est bénéfique de s’attarder à traiter un trouble fonctionnel majeur à la fois. Si c’est le problème de la marche à cause des douleurs à la cheville, notre approche est encore compatible. Je pense que ce qui n’est pas compatible, c’est de refuser de croire à des lésions de neurofibres Abêta quand les tests médicaux sont négatifs alors que nos examens cliniques prouvent bien la présence de lésions.
Mais il arrive que nous faisions face à l’échec avec nos traitements parce que la personne vit trop de stress et de préoccupations qui entraînent plein d’autres symptômes douloureux (qu’on pourrait associer à la sensibilisation centrale alors que ce phénomène entraîne des bifurcations du signal nerveux vers des centres qui habituellement ne sont pas responsables d’analyser une douleur, comme un centre qui a la responsabilité d’analyser la peur et qui en vient à analyser aussi une douleur). Ne pouvons-nous pas alors penser que les approches de traitement du TNF seraient bénéfiques? Le livre de Dr Gabor Matté « Quand le corps dit NON, le stress qui démolit » rapporte d’ailleurs plein d’exemples de l’effet de nos pensées et de nos schèmes de fonctionnement sur le développement de maladies physiques. Et quand on dit de remonter le fleuve des souvenirs, alors nous reconnaissons bien qu’un événement traumatique passé non guéri puisse bloquer l’évolution de nos traitements.
Je ne vois pas que ce soit complètement incompatible de reconnaître la présence du TNF et du SDRC. Il me semble que chronologiquement, le SDRC est d’abord présent et si le stress est trop intense, un TNF se développe. Ma compréhension du tout demeure très embryonnaire. Je peux faire fausse route.
Merci pour tous vos commentaires qui nous aident à démêler ces nuances.
Guyane