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Au sujet d’une névralgie du nerf pudendal chez un jeune

Bonjour tout le monde,
Suite un grave AVP (fracture complexe de bassin, multiples fractures à niveau lombaire, syndrome de la queue de cheval, ...) un jeune m’est adressé par un médecin de mon Centre pour bilanter un ‘endormissement’ à niveau de la face postérieure de la cuisse.
Dans un premier bilan, je ne trouve pas d’allodynie sur le vaste territoire que je bilante, mais oui une hypoesthésie assez importante sur le territoire du nerf cutané postérieur de la cuisse…. je le propose des exercices de touche à tout, puis on se donne rdv une semaine plus tard…
deux jours plus tard je croise au patient dans le service Kiné et il m’interpelle. Il me dit ressentir une douleur aux fesses, surtout quand il est assis et il se touche, de sensations de picotement assez désagréable
là je le propose de refaire un bilan. Je suspectais que bien j’aurais du d’aller plus loin avec mon premier bilan, ou bien c’était le jeune patient qui avait eu un peu honte de me raconter ça à la première séance
au deuxième bilan, à la vue des antécédents du patient et du contexte, je décide de bilanter la région lombaire, sacre et refaire la face postérieure de la cuisse (…) comme résultat , j’ai trouvé un territoire allodynique sur le territoire du nerf clunial moyen III, puis une hypoesthésie à niveau du fessier, mais qui avait « l’aire » d’arriver un peu plus loin de là
une fois terminé le bilan, on est resté sur la discussion, je l’a expliqué, que de fois , il arrive que suite à ce genre de fractures il y a une manque-ou perdue- de sensibilité, avec ou sans douleur, à niveau génital -périnéal. A la fin, le patient m’avoue qu’il ne sent pas bien à ce niveau, et qu’il ne sent pas du tout à niveau de son pénis
à priori il se plaint pas de douleur ou de sensations désagréables, mais logiquement ça l’embête beaucoup. Mr doit passer un bilan pour bilanter la fonction de sa vessie
je me pose plein de questions, sur le rapproche, le bilan à faire ou à remplacer pour de questions , sur la rééducation à le proposer…. Je reste à votre écoute 😊
belle semaine
David Ramirez -Albi 81FR

Réponses

  • Bonjour David, toutes et tous,

    Revoyons ta démarche si tu veux bien.

    J’imagine que dans ton bilan, tu as identifié les qualificatifs soit par questionnement ou via le QDSA avec ton patient? Si oui, as-tu au moins 3/5 qualificatifs de douleurs neuropathiques de présents? (Voir p.79 de notre manuel de 4e édition).
    Les douleurs sont-elles intermittentes ou incessantes? Au toucher ou spontanées? À quels endroits? Ces informations t’aideront à énoncer ta condition.
    Une fois que tu soupçonnes de l’allodynie mécanique, il faut prioriser cet examen clinique d’abord avec l’EVA, puis l’allodynographie d’un seul territoire de provenance cutanée. S’il s’avère positif avec l’allodynographie, prioriser le traitement de l’allodynie mécanique à celui des hypoesthésies. (p. 275 du manuel 4e édition, sous D. Rééducation). Advenant qu’il y ait plus d’un territoire de provenance cutanée atteint d’allodynie, alors choisir avec le patient celui qui est le plus important pour lui à traiter, en autant qu’il ne se situe pas dans la zone à « ne pas toucher » d’un autre territoire allodynique.
    As-tu fait le 5e point après ton allodynographie? Si oui, il est de quelle couleur pour identifier la sévérité de l’allodynie? (p. 186) Tu pourras ensuite énoncer le pronostic pour traiter cette allodynie de ce territoire de provenance cutanée.
    Je t’invite ensuite à nous énoncer la condition exacte qui découle de ton examen clinique. Nous pourrons t’aider à reformuler au besoin.

    Les autres territoires hypoesthésiques seront à évaluer seulement après le traitement de l’allodynie et de l’hypoesthésie sous-jacente du premier territoire traité.

    J’espère que ces détails t’aideront à orienter ton suivi.

    Continue de nous faire part de ton raisonnement et de ton suivi, c’est bénéfique pour tout le monde!

    Bonne fin de journée!

    Guyane Mireault, erg et RSDC®️, Namur, Québec
  • Chères toutes, chers tous,
    Cher David, chère Guyane,

    Envie de réagir sur cette sensation de honte, voire de dénégation de ton jeune patient, cher David, la sensation indicible de l'absence d'une partie de son corps, au coeur de l'intime.

    Pour qu'il se sente moins seul, en exil, au milieu d'une déchirante brume d'incompréhension, peut-être que tu peux lui délivrer le témoignage d'un homme qui souffrait aussi au même endroit de douleurs terribles, de celles qui conduisent à l'isolement et au découragement.

    Il s'agit dans les e-news 2011, tome 8 (volume2) du témoignage n°33 : "je vis une sorte de cohabitation avec un "être" bizarre, pas bienvenu chez moi."

    Quelques extraits qui m'ont semblé significatifs:

    "... éclairs de douleur électrique ; très grande gêne pour marcher ; etc. Par ailleurs, la partie de mon corps touchée commence à m’inquiéter et à m’obséder. Pourquoi le mal s’est-il posé sur mes parties génitales ? Est-ce une maladie psycho-somatique ? Est-ce que j’ai un problème avec le sexe ? Il est des nuits où je crois que je vais devenir fou, tellement les démangeaisons sont intenses et tellement je suis obsédé par elles"

    "J’aimerais savoir si d’autres cas identiques au mien existent, mais aucun dermatologue ne m’a jamais donné de réponse à cette question fondamentale. Savoir que ce problème existe, que d’autres personnes en souffrent, que mon mal n’est pas uniquement une création de mon corps et de mon esprit, que je ne suis pas entièrement et uniquement responsable de mes souffrances, etc."

    "Un jour, lisant le journal local, je tombe sur un article à propos du Centre de rééducation sensitive de Fribourg. Il s’agissait du cas d’un patient atteint d’un mal mystérieux, que la médecine dite « académique » était impuissante à aider. Ce patient, venu à Fribourg de l’autre bout de la planète, expliquait qu’il avait trouvé au Centre de rééducation sensitive les premières réponses concrètes à ses difficultés."

    En espérant que les explications et conseils de Guyane puissent t'aider à aller de l'avant en confiance et que la lecture de ce témoignage puissent aider ce jeune à tenir...

    Mes meilleurs messages.
    Estelle

  • Bonjour David, bonjour à tous,

    As-tu pu avancer avec ton patient pour cette situation au combien particulière et intime. Le bilan n'est pas aisé pour ces territoires de provenance cutané. Tout comme prescription de ne pas toucher une zone perpétuellement stimulée.
    Tu parles de kinésithérapie, ceux-ci sont ils aidants dans ta prise de charge ?
    Impatiente de lire la suite car c'est une situation pas si fréquemment rencontrée du fait de la honte ressentie par le patient comme tu le dis si bien et le rapporte le témoignage de patient amené par Estelle. Les parties génitales restent un tabou selon les cultures et le partage de ton expérience peut aider d autres à dépasser cette gêne qui provient autant des patients que des thérapeutes.

    Au plaisir de te lire.

    Maéva
  • Bonjour David, Bonjour à toutes et tous

    Je me permets de te relancer pour savoir où tu en es de tes bilans et de ta prise en charge. C'est toujours intéressant de savoir comment progresse une prise en charge particulière.
    Je te fais aussi passer un lien vers une vignette clinique où il est question d'une hypoesthésie tactile des branches labiales antérieures du nerf ilio-inguinal droit (Vignette cliniques N°3) dans un territoire "délicat". J'espère que cela pourra aider.
    https://www.neuropain.ch/sites/default/files/e-news/forum.neuropain.ch_somatosens_pain_rehab_18_4_5.11.2021.pdf

    Dans l'attente de te lire.

    Valérie

  • Bonjour David, toutes et tous,

    Comme le mentionne Valérie, il serait intéressant de savoir comment se passe le suivi de ton patient, David.

    Je viens de lire un article intéressant à propos des névralgies obturatrices (2009) qui pourrait pister certaines interventions médicales, mais qui nous montre combien les médecins et spécialistes sont incapables de faire des tests pour poser un diagnostic à propos des douleurs neuropathiques. On peut d’ailleurs lire dans l’article: «Le diagnostic est essentiellement clinique car aucun examen complémentaire ne permet de faire un diagnostic formel de cette névralgie » et plus loin, on y mentionne que l’IRM et l’EMG étaient normaux chez les 17 patients de l’étude. Ils ont dû faire un « test d’infiltration sélective du nerf obturateur » pour confirmer le diagnostic.

    J’espère que les auteurs ont découvert la rééducation sensitive des douleurs neuropathiques depuis ce temps pour faire appel à nos services afin de faciliter le diagnostic!

    L’article est intéressant pour nous montrer des exemples de névralgies de nature compressive. Je me questionne tout de même à savoir si parmi leur cas, ceux qui n’ont pas vu de progrès (3/17) étaient atteints ou non d’allodynie mécanique…

    Voici l’article:
    J. Rigaud, J.-J. Labat, T. Riant, M. Guerineau,O. Bouchot, R. Robert. Progrès en urologie (2009)
    19, 420—426. Névralgies obturatrices: prise en charge et résultatspréliminaires de la neurolyse laparoscopique. Elsevier Masson
    (Désolée, je n’arrive pas à vous coller le lien de l’article).

    Bonne lecture et bonnes réflexions!

    Guyane
  • Pour compléter mon commentaire, David, si j’apporte cet article dans ta discussion, c’est que les névralgies obstructives dont il est question se passent toutes dans le pelvis. Peut-être que ton patient fait aussi face à ce type de névralgie parmi ses différentes conditions?

    Guyane
  • Bonjour !
    je suis ravi d’avoir vôtres retours ! je vais prendre un peu le temps pour lire les deux articles
    GuenotMaeva, oui, je parlais sur la pec en kiné parce que il y a le côté moteur aussi assez touché. Le patient fait de la rééducation de son périnée (il a eu de fuites et aussi il a un problème d’érection) puis il bénéficie de la kiné suite à sa fracture du basin

    Le patient progresse très bien, je vais le re-bilanter après Noel ( il a quitté le Centre. Il viendra qu’en consultation pour le suivi) je reviens vite vers vous !!
    Merci bien et belle journée
    David

  • Bonsoir David, bonsoir à toutes et tous,
    Merci David pour le retour sur ton patient. J'ai hâte de savoir ce qu'il en est.
    Je me permets aussi de rebondir au sujet de l'EMG négatif. Je crois savoir qu'un EMG négatif ne rend pas compte d'une éventuelle lésion du nerf mixte qu'est le nerf obturateur. En effet, un EMG n'est pas valide pour tester les neurofibres Aβ.
    De telles lésions Aβ génèrent une hypoesthésie tactile du tiers MOYENS de la face médiale de la cuisse et non du pubis. Et selon notre atlas nous parlons de névralgie lombo-fémorale.
    Dans l'attente d'en lire plus,
    Bon week-end à tous

  • Merci pour ces précisions Valérie!

    Effectivement, l’EMG n’est pas un test fiable pour diagnostiquer une douleur neuropathique. Raison pour lquelle je relevais le fait que les spécialistes n’ont pas nos moyens pour compléter leur diagnostic.

    Je n’avais pas réalisé par contre que « névralgies obturatrices » faisait référence au « nerf obturateur »… j’ai confondu le terme « obturation » et « compression ». J’aurais peut-être mieux compris s’ils avaient parlé de névralgie lombo-fémorale… je n’ai pas ouvert mon atlas, mais en vérifiant bien à la p.62, ô surprise, nous retrouvons effectivement le territoire de provenance cutanée du nerf obturateur parmi le territoire de la branche génitale du nerf génito-fémoral, dans le tiers moyen de le face médiale!!! Mille excuses!

    Bonne fin de semaine en préparation à l’arrivée du congé des Fêtes!

    Guyane
  • Rebonjour David, Estelle, Maéva, Valérie, toutes et tous!

    David, la situation de ton patient me fait encore réfléchir…

    Quand nous allons chez un médecin pour un PAP test ou un test de prostate, (ou autre au niveau des parties génitales), nous sommes gênés de se dévoiler. Mais le médecin en a vu d’autres et sait comment ne pas embarquer dans notre gêne ou notre honte s’il y a lieu. Il fait son travail pour notre bien et quelques secondes ou minutes suffisent pour traverser la gêne.
    Ce qui aide, c’est que le médecin NE SE MET PAS à sympathiser et à montrer qu’il comprend notre gêne. Ce serait sinon un reflet qui nous justifie dans notre gêne ou notre honte.

    Avec nos patients, il faut aussi se conditionner l’esprit que le nerf pudental est un nerf comme les autres que l’on peut traiter. Et fait à noter, le nerf pudental ne porte plus le nom de « nerf honteux »! En demeurant empathiques avec nos patients, sans devenir sympathiques, nous pouvons aider le patient à mieux nommer ses symptômes et à dévoiler ses parties intimes sans gêne et je l’espère, sans honte!

    Au Centre de rééducation sensitive de Fribourg, ils ont traité 95 vulvodynies (tout aussi fréquentes que les scrotalgies) selon cet article:

    https://www.neuropain.ch/sites/default/files/e-news/somatosens_pain_rehab_18_3.pdf#page=9

    Ces données peuvent être encourageantes pour nos patients qui craignent ne jamais revoir leurs capacités sexuelles ou mictionnelles.

    Épaulons-nous à devenir des aidants qui projettent la confiance!

    Bonne et belle journée!

    (Ici, à Namur au Québec, il fait plutôt froid avec -15 degrés Celcius!)

    Guyane
  • ReRe bonjour David, Estelle, Maéva, Guyane, toutes et tous ...

    ... et pour compléter le message de Guyane du 18/12 sur l'EMG : C'est la neurographie sensitive qui est l'examen paraclinique pour diagnostiquer les douleurs neuropathiques définies. Si nous voulons être précis et utiliser le bon outil, il nous faut donc parler ENMG.

    Bonne semaine à tous,
    Valérie

  • J’avoue que je suis un peu mêlée entre ces termes… l’article parle de EMG mais j’ai vu aussi d’autres articles d’Europe parler de ENMG… je pensais que c’était le même test mais avec des façons différentes de le nommer…
    Dans les résumés médicaux que nous recevons de nos patients au Québec, je ne me rappelle pas avoir déjà vu de ENMG. On n’y parle que de l’EMG.
    Mais si je ne me trompe, un ENMG négatif ne signifie pas non plus l’absence d’atteinte axonales Abêta? Donc n’est pas non plus un test fiable pour diagnostiquer une douleur neuropathique? Selon cet article entre autre…
    https://www.researchgate.net/publication/328134106_Neurographie_negative_mais_douleurs_neuropathiques_probables

    Merci Valérie de susciter les discussions, c’est formateur!!

    Guyane
  • Je ris de moi-même en ce moment!!! L’article que je viens d’envoyer en réponse à Valérie parle de l’EMG et de l’ENMG!!!

    Je commence à comprendre… « mais nous ne pouvons nous attendre à plus d’un âne, je suis un âne. » (Anthony De Mello) ;-)

    Bonne journée!

    Guyane
  • Bonjour Guyane,
    Bonjour à toutes et tous,

    En lisant votre conversation, j’ai dû reprendre le manuel pour faire le point sur ses deux examens cliniques aux noms si proches « EMG » et « ENMG ». Voici un petit extrait de la section sur les examens paracliniques du manuel (P. 263)
    « L’examen électroneuromyographique (ENMG) est une méthode exploratrice électrophysiologique du nerf et du muscle. Cet examen présente deux parties :

    • La neurographie qui permet d’étudier la transmission des activités électriques le long des nerfs et de mesurer divers paramètres qui reflètent cette conduction nerveuse sensitive. Elle est réalisée à l’aide d’une électrode appliquée à la surface de la peau ;
    • L’électro-myo-graphie (EMG) qui permet l’analyse des activités musculaires au repos et à l’effort chez le sujet normal ou dans des conditions pathologiques variées, par exemple, pour préciser une radiculopathie. Elle est généralement réalisée à l’aide d’électrodes à aiguilles, piquées dans le muscle. »

    Il y a de quoi s’emmêler les pinceaux! ;)

    De plus, il est important de rappeler qu’un ENMG négatif ne veut pas forcément dire qu’il « n’y a pas » de lésion mais que celle-ci n’est pas détectable. L’examen clinique est souvent plus sensible. Alors poursuivons courageusement nos recherches de lésions axonales Aβ.

    En vous souhaitant à toutes et tous de belles fêtes de Noël.

    Marion

  • Excellentes explications, Marion!

    Merci d’avoir trouvé ces extraits dans notre manuel et de les avoir mis dans ton commentaire.

    Joyeux Noël à toutes et tous!

    Guyane
  • Bonjour à tous,

    Petites question pratique. Vous en voyez souvent des ENMG ? Par ce que chez moi NON.

    Bonnes fêtes à tous.
    Maéva
  • Bonjour Maéva et bonjour à tous,
    Chez nous (CRRF de Saint Gobain dans les Hauts de France) nous voyons peu d'ENMG mais ça arrive tout de même...
    Par contre, sachant que le résultat a des risques d'être négatif et que celà ne signifie pas pour autant qu'il n'y a pas de lésion, je me demandais si on pouvait "suggérer" aux médecins de l'éviter, surtout en cas d'allodynie?

    bonne fin d'année à tous!!

    Céline

  • Chères Céline, Maéva, Guyane, Marion, Valérie et toutes les autres
    Cher David et confrères,

    Afin de poursuivre cet échange très intéressant sur l'ENMG, sans encombrer la réflexion toute aussi intéressante sur la névralgie pudendale débutée par David, je me suis permis d'ouvrir une nouvelle discussion intitulée "Douleurs neuropathiques probables ou définies ? - ENMG".

    Je vous invite à y réagir - sans modération !
    Merci infiniment à toutes et tous pour ces échanges.

    Je vous souhaite de très belles fêtes de fin d'année.

    Florine, RSDC®
    Fribourg - CH

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